New York, The City (2)
Jeudi 9 avril
Réveillée à 10h avec la flemme. Temps radieux. Peut-être
15°C. Ahmed m’a demandé de rester jusqu’à 14H pour que je récupère un colis
Fedex en son nom. Je suis restée devant la tv jusqu’à 15h15. Pas de colis. Ai
regardé un film par intermittence : un film avec Meryl Streep qui est la
psy de Uma Thurman et qui découvre qu’elle sort avec son fils de 23 ans, alors
que Uma en a 37 et sort d’un divorce. Ai abandonné le film avec Meryl Streep car
toutes les 10 min, les programmes sont interrompus par des pubs (sans
annonces). Ma/mes dents de sagesse réessaient de sortir et j’ai un peu mal dans
toute la mâchoire. Je saigne systématiquement que je me brosse les dents et je
sens celle d’en haut à droite forcer pour prendre sa place. Une partie a émergé
de ma gencive tout au fond de ma bouche. C’est assez désagréable.
Sortie découvrir le parc. Le 'réservoir' est un vaste lac
entouré de barrières où beaucoup de joggers se donnent rdv. Énormément de monde
assis dans l’herbe, jouant ou joggant. Gens de tous types : étrangers,
posh people, jeunes se languissant au soleil, gamins guidant des voiliers sur
des minis lacs. Me suis dit que les photos que je ferais n’allaient être que
touristiques et cela m’a pas mal déprimé. Ai vu 2 photographes avec un
réflecteur prenant des portraits et faisant signer un 'model release'. Ai encore
plus déprimé. Je croyais compter sur la géographie pour perdre quelques sentiments parasites. Ai-je
assez de cailloux blanc pour retrouver mon chemin ? Ou, autre possibilité,
le projet imposé et violent d’avancer pour en construire un. Pas d’énergie pour
demander aux New Yorkers de poser devant mon appareil de rechange, légèrement
pourri : un vieux Nikon F3 avec un objectif un peu trop sensible à mon
goût. Passée de nouveau devant
Vendredi 10 avril
8h entendu le réveil. 9h entendu le téléphone de la collocation, pris un petit dèj conséquent. Direction ICP pour changer légèrement
de matos et disposer d’un locker (casier à
Oublié
mon câble pour transférer les photos de mon petit Pentax numérique. Décidé de
poser ma première pelloche au laboratoire Sunshine, sur la 31e,
conseillé par Marina Berio. Prix: $10 avec tirages ou planche contact. Refusé et
n’ai pris que le développement à $5, ce qui bien sûr ne fait jamais vraiment la
somme dite puisque les taxes se rajoutent. Puis remonter vers Broadway pour
prendre un métro (ligne R) jusqu’à Brooklyn Bridge. Temps maussade. Pris un
sundae chocolat dégueulasse pour $5. Sur le pont, beaucoup de touristes et de
cyclistes criards qui n’apprécient pas que les piétons empiètent sur leur piste
cyclable. Quelques photos puis il s’est mis à pleuvoir. Rentrée jusqu’à ICP.
Rdv à 17h45 avec Ahmed pour lui filer du matos, emprunté en mon nom, afin qu’il puisse shooter une soirée
d’anniversaire à $200. Présenté Diego. Ai dit que j’étais dans la section
General Studies (c'est-à-dire la section Art, s’opposant à PJ, Photo Journalism
Studies, la section documentaire, pour ceux qui veulent finir au New York Times).
A 18h avait lieu l’ouverture de la nouvelle expo à ICP, Bard MFA trucmuche. Regardé
chaque travail attentivement. Un m’a beaucoup plu, celui de Theresa
Edmonds : travail sur elle et sa famille. Bu une bière d’ouvrier,
Heineken, mangé des bretzels en apéritif (comment l’autre c** a pu s’étouffer
avec un truc pareil ?), envoyé de nouveaux mails puis repartie en
direction de la maison (ligne 7 puis 6). Sensation bizarre de devoir être
heureuse mais de ne pas l’être.
Samedi 11 avril
10h30 réveillée avec la pluie. Pris mon p’tit déjeuner,
une douche, maquillée et emprunté l’ordi d’Ahmed vers 12h30, qui dormait
encore, pour envoyer quelques mails. Amélie m’envoie un mail pour que l’on
boive un verre ensemble le soir. Vers 14h, décidé d’aller voir Brooklyn Bridge
du côté de South See Port. Ai retiré sur le chemin la somme de $400 dans un ATM
pour payer le loyer de mes colocataires. A South See Port, il y a d’énormes
voiliers et un ensemble de boutiques souvenirs dans le port. Ai fait mon chemin
de ronde avec l’objectif puis lèche vitrine en vue de futurs souvenirs :
mugs, porte-clefs et T-Shirt « I love New York » pour les copains et
moi. Big drapeau Américain en nylon $15, T-Shirt : $12, Sweat-shirt :
$25, mug : $7, porte-clefs : j’ai oublié. Ai filmé en plan fixe
(rarement mon cas jusqu’avant mon arrivée ici) les scènes du port. Il s’est
arrêté de pleuvoir vers 16h. Dirigée vers l’ex World Trade Center, dit Ground
Zero. Vue bouchée par les travaux et la pub des travaux (1, 2, 3, 4 World Trade
Center ?). Enorme trou au sein du quartier financier. Puis remontée vers
le Nord de la ville, quartier sympa. Appel d’Amélie fixant notre rdv à Bedford
Avenue dans Brooklyn à 19h, ligne L. Petit arrêt au Starbucks pour un chocolat
chaud et un rainbow cookie (un peu sec). Se diriger vers le City Hall pour
reprendre le Métro, ligne R, puis changement à Union Square, ligne L vers
Brooklyn.
Arrivée en avance, marché le long d'une rue à la recherche d'une image. Fait une. Retournée à la bouche de métro, observé les gens en attendant Amélie. Brooklyn fourmille de jeunes très tendances qui baladent leurs chiens très tendances en habit très tendances, les chiens comme les maîtres. Amélie a une vue imprenable sur Manhattan; elle peut voir les buildings s'enflammer le soir et paraît-il que les levers de soleil sont aussi beaux. Elle garde le chien de Marcela, Lala. Vieux chien chihuahua super moche et qui a la tremblote en permanence. Puisqu'elle grogne lorsqu'elle lui met sa laisse, A. a décidé de la lui laissé autour du cou. Chien pisse et crotte dans la maison. La promener ne sert qu'à l'empêcher de déprimer. Sommes allées dîner dans un resto-bar au coin de la rue. A. n'a bu qu'une bière, j'ai pris une salade du Tennesee avec un coca. Coût $12 avec les pourboires (tips). Puis repartie direction l'Apt 30, 64E 97th Street. Ahmed s'était levé à 16h et bidouillait sur son ordi. Doit rendre une présentation de ses recherches (imageries médicales du coeur) pour une conférence à Hawaï. Il part vendredi prochain.
Télé ne marchait pas. Ai filé au lit.
Dimanche 12 avril
9h30 réveillée avec le soleil et un petit vent frais.
Branches de l’arbre s’agitent légèrement dans le vent.
Ecrit jusqu’à midi. Fait quelques courses pour $17 :
pâtes, lait, parmesan, 1 pot de confiture St Dalfour et 1 bouteille de coca.
Puis Starbucks pour prendre un cappuccino ($3,47) à emporter. Cuisiner un bon
déjeuner. Recommencer à écrire. 5e page. Solitude extrême.
Intégration, zéro. Tristesse latente. Décide d’aller prendre l’air en longeant
Central parc via la 5e Avenue. Énorme tristesse qui me prend à la
gorge. Tente de refouler les larmes que je sens monter. Les gens semblent
heureux, il fait très beau. Les riches de l’Upper East Side sont bien habillés.
Je marche et je marche en direction d’ICP. Ne me rappelle plus si j’ai
photographié, en tout cas pas de portraits (ma grande frustration et fouet
psychologique), je n’y arrive pas. Non, je n’arrive pas à me sentir bien pour
demander aux gens.
Longue marche. Arrivée à ICP, quelques mails puis le
gardien me dit que l’école ferme à 18h, 6 p.m.. Je ramasse mes cliques, pointe
mon départ avec ma student card magnétique et pars. Je prends des photos avec
mon numérique. Des skyscrapers. Point de vue de la fourmi. Comprends subitement
le côté apocalyptique des films américains et surtout ceux sur l’anéantissement
des buildings, Independence Day, Deep Impact, Le Jour d’Après, ou même la fictionnalisation de l’anéantissement
du WTC en sept. 2001. Voir le monde s’effondrer devant soi. Voir les yuppies en
cravate sauter et s’écraser en un bruit sourd de carcasse sur le sol froid de
New York. Sensation que Manhattan est un piège et que le ciel est toujours
bouché. Toutefois, reprendre confiance en soi lorsque, absorbée par la vision
du gigantisme, le regard chutant vers l’horizon hospitalier, un jeune homme
barbu avec une écharpe jaune vif me glisse un sourire au croisement de nos
marches respectives. Quelques instants après, je me retourne pour le voir continuer sa marche. Closer échoué. Mais réconfort. « And so it is, just like you
said it would be ». Damien Rice in my mind. Je rêvasse. Retour vers
Times Square, non exploré à ce jour. Fourmillement électrique et populaire.
Masse de gens qui se croisent et se heurtent autour des innombrables écrans
publicitaires. Prends des photos. M’arrête, reprends, piétine, joue avec
l’appareil et ses possibilités de captation. M’amuse à me dire que je regarde
un écran (appareil numérique) prenant des écrans (Times Square) en photos.
Touristes mitraillent. Il y en a même un qui se la pète : il court, me
dépasse et subitement s’accroupit pour prendre des photos d’écran. Je le
dépasse puis répétition de la scène. On dirait qu’il chasse. Il doit aimer se
sentir en danger, il se tient entre le trottoir et la route, inondée de taxis
jaunes. Les écrans risquent sans doute de disparaître si on ne les immortalise
pas dans l’excitation. Je fais une vue en surplomb de ma basket rose sur la
grille du métro. Je trouve l’idée enfantine, facile, déjà surfaite, me
rappelant mes premières photos à l’université sauf que c’était des Doc
Marteens. Je renouvelle l’opération le long du parc. Je rentre à la maison zu
fuss. Portraits zero mais de belles images touristiques que je retravaille avec
Photoshop sur le lit. Je vis sur le lit avec toutes mes affaires : ordi,
agenda, carnet de note, livres, prospectus, maps, polaroids, stylos. J’écoute
de la musique avec mon casque. Je chante les paroles. Non, je les crie. C’est
mieux. J’évacue. Je suis soulagée. Noah rentrera demain du Vermont. Ahmed est
parti se prendre un sandwich au Subway du coin. Le mec du câble passera mardi
voir pourquoi nous n’avons plus d’images sur